Critique film
Publié le 04/12/2019 à 13h14 par Floriane
The Shining
10 /10

Splendeur sauvage du paysage, une voiture serpente sur une route de montagne, stoppe devant un palace des années folles, isolé, désert : c'est le jour de la clôture annuelle, le personnel ne reviendra qu'aux beaux jours. Jack a accepté de passer l'hiver ici avec sa femme et son fils pour assurer l'entretien des lieux. Ecrivain en mal d'inspiration, il espère pouvoir achever dans cet ermitage de luxe le roman qu'il porte en lui. Un univers insolite où la réalité dérape.

Après l’échec commercial de sa fresque historique "Barry Lyndon", Stanley Kubrick se tourne vers le genre horrifique. Seulement, le cinéaste ne souhaite pas tomber dans les clichés gores et du Diable en mal absolu à la sauce "L'Exorciste". Son choix finit par se porter sur le roman de "The Shining" écrit par celui que l’on surnommait déjà "le maître moderne de l’horreur", Stephen King.

Avec "Shining", Stanley Kubrick s’amuse à jouer des codes des films de genre pour mieux les tordre. Ici, le mal est insidieux et transpire dans chaque plan, sans jamais vraiment se montrer. Le cinéaste utilise le concept de la maison hantée et isolée pour mieux les déconstruire avec des perceptions extrasensorielles où le temps n’est plus une notion sûre. Kubrick fait déambuler Danny (Danny Lloyd) et Jack (Jack Nicholson) pour installer un climat angoissant. Il déjoue les attentes des spectateurs habitués de ce genre de films pour mieux les déstabiliser, comme l’hôtel et ses esprits déstabilisent les personnages.

Kubrick économise ses effets pour mieux créer la peur avec des visions d’horreur jamais vues à l’époque, comme la marée de sang, les jumelles, la vieille dame nue, etc. À cette horreur hypnotisante, Kubrick ajoute une thématique sur les relations père / fils / mère, mais aussi de la schizophrénie, thème de prédilection du réalisateur.

Par son scénario et sa mise en scène labyrinthique, le film nous fait perdre tous nos repères. Le passé et le présent se confondent. Et c’est là que l’on reconnait le génie de Kubrick. Avec son ambiguïté très forte, "Shining" fait partie de ces films dont chacun voit une interprétation différente. Critiques, cinéphiles et amateurs s’écharpent à analyser le film depuis des années. En particulier sur le sens du plan final, dont Kubrick n’a jamais révélé la signification. Rodney Ascher en tirera même un documentaire ("Room 237"), où professionnels et amateurs illustrent leurs théories les plus folles.

Et si le scénario, écrit en collaboration avec l’autrice Diane Johnson, est remarquable dans son ambiguïté, c’est la mise en scène de Kubrick qui finit de faire de "Shining" un chef d’oeuvre. Et cette richesse technique est en grande partie dû à la steadicam (une caméra permettant des mouvements de caméra sans vibrations. Parfaite pour les travellings). Kubrick l’utilise pour déambuler dans l’hôtel (la fameuse séquence où Danny fait du vélo dans les couloirs) et ainsi donner vie à l’Overlook.

Le film, qui est devenu culte, est depuis étudié dans de nombreuses universités et écoles de cinéma. Pourtant, il y a une personne qui crache sur le film depuis sa sortie : Stephen King. King est connu pour presque toujours détesté les adaptations de ses oeuvres (quoi qu’il semble s’être calmé depuis quelques années). Il reproche à Kubrick d’avoir trahit son livre. En effet, le film est très différent du livre. La différence principale est le personnage de Jack Torrance. Dans le film, il est schizophrène dès le début. L’hôtel ne fait qu’accentuer sa descente dans la folie. Dans le roman, Jack est un ancien alcoolique, mais sain d’esprit qui est victime des forces à l’oeuvre de l’Overlook. L’auteur voulait montrer qu’un bon père pouvait se transformer en monstre. King admettra plus tard que le roman est en partie autobiographique. D’où son ressenti négatif suite aux changements effectués par Kubrick. Plutôt que de choisir un camp, on peut voir le film et le livre comme deux oeuvres qui se complètent. D’un côté un exercice de style labyrinthique et intelligent. De l’autre, un récit personnel teinté d’horreur.

Bref, "Shining" de Stabley Kubrick fait partie de ces films qu’il faut avoir vu tant il tient du chef d’oeuvre. Et si vous voulez aller plus loin, on vous conseille de découvrir la suite de "Shining", "Doctor Sleep" réalisé par Mike Flanagan ("The Haunting of Hill House").

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