Critique film
Publié le 28/11/2018 à 16h01 par Kévin Aubin
Les Frères Sisters
6,5 /10

Charlie et Elie Sisters évoluent dans un monde sauvage et hostile, ils ont du sang sur les mains : celui de criminels, celui d'innocents... Ils n'éprouvent aucun état d'âme à tuer. C'est leur métier. Charlie, le cadet, est né pour ça. Elie, lui, ne rêve que d'une vie normale. Ils sont engagés par le Commodore pour rechercher et tuer un homme. De l'Oregon à la Californie, une traque implacable commence, un parcours initiatique qui va éprouver ce lien fou qui les unit. Un chemin vers leur humanité ?

Jacques Audiard est le fils du réalisateur et dialoguiste Michel Audiard. Jacques Audiard se destine au professorat, mais après des études de Lettres avortées, il se lance dans le cinéma et débute comme monteur. Il s'essaie avec succès à l'écriture de scénarios avant de passer à la mise en scène en 1994 avec Regarde les hommes tomber. Le film remporte notamment le César du Meilleur premier film. Mettant parfois du temps à réaliser ses films, il est auréolé de succès avec Sur mes lèvres, film qui récolte 9 nominations aux César. S'en suivent d'autres réalisations saluées à chaque fois par les critiques et le public.

En 2018, il revient avec Les Frères Sisters, adapté du roman du même nom de Patrick DeWitt. Le réalisateur ne déroge pas à la règle et met une nouvelle fois en avant le masculin. Ici, il l'interroge au travers d'une relation fraternelle. Davantage intimiste et psychologique que spectaculaire, ce western questionne l'humanité de nos deux héros, leur rapport qui les unis et les embarque dans une quête initiatique voire de rédemption pour une oeuvre singulière qui pourra en laisser plus d'uns sur la touche. En effet, et même si on pouvait s'attendre à ce résultat de la part d'Audiard, il est parfois difficile de rentrer complètement dans cette histoire fraternelle introspective au rythme assez lent dont le scénario est au final bien maigre. Pourtant dès le départ, le film saisit par une scène d'ouverture superbement orchestrée annonciatrice d'une oeuvre magistrale en perspective. Malheureusement la suite n'est pas celle attendue et étonnement déçoit. L'histoire manque cruellement d'enjeux et fait errer nos deux héros dans une aventure sans le grand A. Si le questionnement sur l'homme est intéressant et amène à de très beaux moments de cinéma, tout ce qui est autour paraît futile voire inutile au grand damne du spectateur qui finit par trouver l'ennui. L'ensemble du film tourne un peu en rond et n'arrive pas à convaincre sur la durée. Les rebondissements sont aux abonnés absents et seul les moments intimistes entre nos deux héros sortent du lot. Mais étant en grande majorité, on finit par ne voir que ça et s'y désintéresser. On s'attache autant que l'on se détache des personnages qui pourtant sont bien amenés et écrits. Peut-être qu'un second visionnage est nécessaire pour confirmer ou infirmer l'opinion que l'on peut avoir sur ce film singulier.

Jacques Audiard est comme toujours excellent derrière la caméra et la manie avec maestria. La mise en scène est anti-spectaculaire mais dans le bon sens du terme, les décors sont d'une beauté sidérante, la photographie avec ses couleurs multiples et ses jeux de tonalité est sublime et la bande-son signée Alexandre Desplat est parfaitement maîtrisée. Une grande réalisation au service d'un métrage en demi-teinte.

Joaquin Phoenix de retour au cinéma dans un rôle de composition où il excelle est en soit immanquable pour tous cinéphiles qui se respectent. Encore une fois il porte son rôle à la perfection et s'y investi pleinement. Mais la grande surprise du film est John C. Reilly qui est bluffant. Il trouve ici un premier grand rôle à sa mesure où il crève l'écran voire arrive à voler la vedette à Phoenix. Chacun assigne une personnalité bien distincte pour un duo qui fonctionne à merveille face caméra. On retrouve en seconds rôles, Jake Gyllenhaal et Riz Ahmed qui malgré leur formidable prestation et leur investissement, ne trouvent dans ce film pas des rôles à leur mesure dans le sens où ils manquent de consistance et d'affinement.

Pour sa nouvelle réalisation, Jacques Audiard signe une oeuvre personnelle sur laquelle il faut prendre le temps de s'arrêter. Le résultat peine à convaincre sur l'ensemble même si l'on sent une réelle volonté de sortir des carcans habituels du genre. Reste un duo d'acteurs excellents où John C. Reilly trouve enfin le rôle.

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