Critique film
Publié le 29/02/2016 à 20:29 par Mehdi

A Second Chance

Affiche
8,5 /10
Andreas, jeune flic et papa modèles, flanqué de son collègue Simon, qui boit pour oublier ses déboires sentimentaux, arrivent un matin pour mettre fin à une dispute conjugale. Sur les lieux, ils sont stupéfaits du traitement inhumain que le couple réserve à son nouveau-né. Andreas, ne parvenant pas à retirer la garde de l'enfant à ces parents irresponsables, commettra l'impensable quand le malheur frappera son propre foyer : enlever l'enfant.
"A Second Chance" est avant tout un thriller. Un polar noir où se mêlent les sentiments contraires, où la destinée du héro se télescope avec la destinée d'une famille de junkies, quand il s'agit du bien-être d'un enfant.
Le film de Suzanne Bier développe une portée moralisatrice à travers ces questions : comment laisser des gens détestables avoir un enfant, alors même que les gens honnêtes et droits ont du mal à en avoir un et à l'élever ? Quel poids peut avoir la société pour protéger les enfants nés dans des familles désintégrées ? Et comme réponse à cette dernière : aucun.
C'est le constat amer que fait Andreas (joué par Nikolaj Coster-Waldau), sorte de Robin des Bois moderne. Celui-ci tente de sauver son collègue Simon de son addiction à l'alcool, consécutive à un divorce. Dans le même intervalle il s'occupe avec bienveillance de son nouveau-né, et de sa femme qui semble faire une dépression post-partum. Alors quand il pénètre dans l'appartement insalubre de Sanne (campée par May Andersen), qui a appelé la police pour violences conjugales de la part de Tristan, pervers narcissique et junkie, et qu'il trouve leur enfant dans ses déjections, il n'a qu'une envie : leur en retirer la garde. Mais l'enfant maltraité mais pas dénutri ne peut être retiré à sa mère.
C'est une critique évidente du modèle social danois, loué par le monde entier, qui montre ici ses limites. La réalisatrice semble dire qu'à trop vouloir protéger les personnes, on en vient à les exonérer de leurs actes, si abjects soient-ils.
Andreas devient alors celui qui faute, en substituant l'enfant à ce couple incapable de l'élever, pensant lui apporter la vie qu'il n'aurait jamais eu sans cet acte. Et on pense que ce geste devient égoïste quand Andreas l'apporte à sa femme meurtrie à jamais par la perte de son propre enfant, comme compensation maternelle.
Ce geste paraît pourtant si humain, et les efforts de Tristan pour dissimuler le corps d'Alexander pour ne pas tomber pour homicide sur son fils, nous convainquent peu à peu qu'Andreas a pris la bonne décision. Celui-ci a, de son côté, fort à faire pour cacher ce qu'il a fait aux yeux de son collègue Simon, qui ne tardera pas à découvrir le pot aux roses. Et Andreas commencera à se sentir fautif quand, constatant que sa femme ne guérit pas facilement du traumatisme, il est confronté à un autre amour maternelle auquel il ne s'attendait pas : celui de Sanne qui refuse de croire en la mort de son fils.
C'est cet esprit de rédemption qui va faire douter le spectateur, qui, à l'instar d'un Andreas pris par les remords, ne s'attendra jamais au rebondissement final de ce film qui sait ménager une tension d'un bout à l'autre.

Susanne Bier réussit encore une fois (après notamment "Revenge", oscar du meilleur film étranger) à transcender les tréfonds de l'âme humaine avec une histoire universelle, et pose la question que chacun se pose en devenant parent : vais-je être à la hauteur ?
Cette question Andreas doit se la poser pour deux, puisque sa femme semble si démissionnaire dans son rôle de mère. Il n'est pas loin de comparer la situation de sa femme avec celle de Sanne , deux femmes que pourtant tout semble opposer. Et c'est dans la deuxième partie du film que les deux acteurs, par leurs talents, et leurs interactions, donnent une dimension morale à ce film. Nikolaj Coster-Waldau, très apprécié par les fans de la série à succès "Game Of Thrones", confirme tout le bien qu'on pense de lui depuis de nombreuses années. Prime à May Andersen, plus rompue aux défilés de mode et aux objectifs des plus grands photographes. Ici, pour son premier grand rôle, elle réalise un sans-faute dans cette composition de la mère junkie repentante.

Sans dévoiler l'issue du film, je dois dire que jusqu'à la fin j'ai cru à l'histoire simple du héro qui protège sa femme et l'enfant qu'il a recueilli contre les parents indignes de l'élever.
C'était sans compter dans la capacité de Susanne Bier de faire d'un bout d'histoire, une histoire universelle dans son humanité.

Au final, "A second Chance" est une belle surprise, tant par sa portée philosophique qu'à la qualité de la mise en scène. On pourra juste lui reprocher quelques lenteurs dans le développement de l'intrigue.
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