Critique film
Publié le 30/04/2019 à 14h38 par Kévin Aubin
Ma vie avec John F. Donovan
10 /10

Dix ans après la mort d’une vedette de la télévision américaine, un jeune acteur se remémore la correspondance jadis entretenue avec cet homme, de même que l’impact que ces lettres ont eu sur leurs vies respectives.

Xavier Dolan s’impose très tôt dans le cinéma et sa carrière d’acteur débute par plusieurs films canadiens. Il produit et réalise son premier long-métrage à seulement 20 ans, J’ai tué ma mère, coup de c½ur du Festival de Cannes et concourt à la Quinzaine des réalisateurs. Travailleur acharné, il enchaîne en peu de temps plusieurs réalisations tous remarquées par la critique et le public. En 2016, avec Juste la fin du monde, il signe sa première réalisation au casting français, primée à Cannes.

En 2019, il revient avec Ma vie avec John F. Donovan, son premier film avec un casting américain. Drame d’une rare intensité, Xavier Dolan signe l’un de ses meilleurs films. Hommage vibrant à son expérience personnelle, celle d’une relation épistolaire, débordant de vie mais hanté par la mort, une ½uvre riche et intense qui est la somme de toutes les obsessions du réalisateur : les relations mère-fils compliquées, l’homosexualité et ses discriminations, les amours impossibles… Des thèmes parfaitement abordés tout au long du film dans des scènes magistrales où le spectateur navigue entre plusieurs états émotionnels. Un rythme lancinant s’installe et fait chavirer le spectateur entre réalité et fiction dans les relations des différents personnages qui font écho en chacun de nous. Le film orchestre savamment une série d’allers-retours entre passé et présent suivant trois arcs narratifs où s’entremêlent plusieurs destins au fil d’une intrigue passionnante tant sur le fond que sur la forme. C’est également une immersion dans les rouages d’un milieu qui fait rêver, celui du cinéma, où le réalisateur y porte un regard à la fois passionné et critique. Le spectateur est pendant deux heures de temps aux prises avec une histoire qui entretient le mystère mais aussi dévoile des vérités évidentes parfois difficiles à voir ou à admettre. Une ½uvre ambitieuse avec un sens du romanesque inouï fait par un passionné pour des passionnés.

Xavier Dolan maîtrise totalement son sujet et prouve une nouvelle fois qu’il manie la caméra d’une main de maître. La mise en scène est d’une beauté absolue et met en avant les acteurs à la perfection, les décors naturels des villes comme Los Angeles, New York, Londres et Prague sont des lieux qui ont leur propre histoire et qui jouent un rôle dans l’intrigue du film, la photographie léchée et aux couleurs contrastées participe à créer une ambiance romanesque emportant le spectateur et la bande-son est comme toujours chez Dolan très marquée et remarquable.

Le film bénéficie d’un très bon casting américain. En tête, Kit Harington trouve l’un de ses premiers et meilleurs grands rôles au cinéma. Dolan lui offre une partition d’acteur où son talent explose et emporte l’adhésion de tous. Jacob Tremblay, jeune révélation du film Room, trouve un rôle exceptionnel où chacune de ses apparitions marquent par une qualité de jeu indéniable et sidérant pour un si jeune acteur. Natalie Portman est la touche féminine du métrage et en tant que spectateur, quel plaisir de la retrouver dans un rôle à sa mesure. L’actrice est à la fois subtile et naturelle et offre une très belle performance. Les seconds rôles ne sont pas en reste avec de prestigieux acteurs comme Susan Sarandon, Kathy Bates et Michael Gambon. Tous, même avec peu temps de présence à l’écran, arrivent à faire des prestations remarquées.

Pour sa nouvelle réalisation, Xavier Dolan démontre une nouvelle fois son talent et qu’il est l’un des plus prometteurs réalisateurs de sa génération. Il signe une très belle ½uvre cinématographique servie par un casting incroyable. Les cinéphiles seront ravis.

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