C’est l’histoire d’un type qui va trop vite et d’un gros qui est trop lent. Foster rencontre Taupin. Le premier est en pardessus, le deuxième en guenilles. Tout cela serait banal si l’un des deux n’était en possession d’un scénario effrayant, le scénario de leur vie et de leur mort. Il suffit d’ouvrir les pages et de trembler…
Bertrand Blier démarre comme assistant réalisateur avant de diriger son père, le légendaire Bernard Blier, dans son premier long métrage de fiction, Si j'étais un espion en 1967. Il se fait un nom en 1974 avec Les Valseuses, véritable triomphe public. Déjà, il impose sa patte avec son humour acerbe et une vérité sociale évidente. S'en suivent des films marginaux qui décrochent parfois de nombreuses récompenses.
En 2019, il revient après neuf ans d’absence avec une nouvelle comédie caustique. Habitué aux films absurdes avec un style anticonformiste et iconoclaste, Bertrand Blier s’impose une nouvelle fois dans le cinéma français au risque de décontenancer bon nombre de spectateurs comme d’habitude. Parler de la vie est une chose compliquée si on y accorde trop de sérieux et d’importance, mais c’était sans compter sur le talent du réalisateur pour surprendre et ne pas faire comme tout le monde. N’ayant ni de début ni de fin, le réalisateur déroule le scénario de la vie et de la mort au travers de deux personnages auxquels chacun d’entre nous s’identifie facilement. Ainsi, le spectateur assiste aux aléas de la vie, de ce qui peut arriver sans crier garde et que notre vie n’est peut-être pas si libre voire est entachée d’un destin tout tracé. Faire un film dans le film déroutant au départ mais une fois pris au jeu, le divertissement n’en peut être que jouissif et déroutant. Car si le film est parfois difficile à appréhender, pour qui arrive à s’y confondre, l’expérience cinématographique est garantie. Chacun pourra y voir ce qu’il veut bien voir et l’interpréter à sa façon même si deux aspects évidents ressortent du métrage : la métaphore sur la vie et la mort et l’hommage aux acteurs. Le film offre un moment de cinéma à part entière qui sort des sentiers battus : rebondissements en pagaille, joutes verbales délectables et situations incongrues sont au programme. 1h20 au rythme effréné où l’humour pince sans rire n’a d’égal que le drame qui s’installe tout du long pour des émotions ô combien bousculées. Une farce parfois théâtrale qui se savoure sur l’instant et qui ne manque pas de questionner tout en marquant après coup.
Bertrand Blier à la réalisation est gage de qualité. La mise en scène est rigoureuse et profite indéniablement aux acteurs, les décors de la ville parisienne et les lieux clos créent un vaudeville savoureux, la photographie avec ses clairs-obscurs et sa lumière naturelle est élégante et la bande-son vit au rythme du film de façon enjouée. Une réalisation efficace où une fois encore le travail du réalisateur est impeccable.
Gérard Depardieu et Christian Clavier se retrouvent pour la 7ème fois ensemble devant la caméra et tous deux font des merveilles. Leur jeu d'acteur n'est plus à démontrer et leur seule présence suffit à maintenir une scène dépourvue d'artifices. Ils déclament leurs dialogues à la perfection et campent des personnages leur permettant d'exprimer l'étendue de leur talent. Autour d'eux gravitent beaucoup de seconds rôles tous excellents.
Pour sa nouvelle réalisation, Bertrand Blier signe une nouvelle fois un film anticonformiste dont lui seul a le secret. Un moment de cinéma qui si on arrive à rentrer dedans est tout bonnement jouissif. Et que dire du duo Depardieur/Clavier qui s'amuse à jouer une nouvelle fois ensemble pour notre plus grand plaisir.
